Et si l’on autorisait les producteurs à émettre des GO sans les vendre ?

14 Déc, 2020

Ce 17 décembre 2020, le Conseil supérieur de l’énergie (CSE) examinera un projet d’ordonnance portant transposition de diverses dispositions de deux directives :

  • la directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables ;
  • la directive (UE) 2019/944 du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité.

Sans qu’il s’agisse d’une consultation publique au sens strict du terme, le texte été partiellement soumis à l’avis des acteurs concernés.

En attendant l’avis du CSE -et le texte qui sera ensuite publié par le gouvernement-, plusieurs éléments peuvent être soulignés. Certains ont trait aux garanties d’origine (1), d’autres aux communautés énergétiques citoyennes et communautés d’énergie renouvelable.

1 Garanties d’origine (GO)

L’article 2 du projet d’ordonnance élargit le système des garanties d’origine à l’ensemble des sources de production d’électricité. Il s’agit probablement d’améliorer la traçabilité des informations fournies par les fournisseurs d’électricité. Cela prépare sans doute aussi une future certification des productions d’hydrogène.

« Art. L. 311-20. – Un organisme est désigné par l’autorité administrative pour assurer la délivrance, le transfert et l’annulation des garanties d’origine de l’électricité produite par n’importe quelle source d’énergie primaire ou par cogénération. Il établit et tient à jour un registre électronique des garanties d’origine. Ce registre est accessible au public. »

Cet article prévoit aussi de délivrer des GO aux producteurs non raccordés et aux auto-consommateurs sans qu’ils puissent les vendre.

Légère entorse à la règle générale de non-cumul des GO avec un soutien public

Plus curieux, l’article 3 (GO pour les productions EnR) précise que les installations bénéficiant d’un soutien public en autoconsommation ou alimentant directement une IRVE pourront également émettre des GO, là aussi sans pouvoir les vendre. Il est à observer que cela constituerait une entorse à la règle générale de non-cumul des GO avec un soutien public.

Permettre la certification sans en tirer bénéfice est une bonne idée : pourquoi la réserver à des usages marginaux ? Rappel : dans le système actuel de droit commun, les productions EnR bénéficiant d’un soutien public « disparaissent » littéralement du seul système légal de traçabilité. Elles sont ensuite mises aux enchères par l’Etat (quand il y arrive) dans un système particulièrement lourd. Etrange et légèrement ubuesque.

Aussi, les consommateurs ou fournisseurs qui font l’effort d’acheter directement leur électricité aux producteurs d’électricité renouvelable sont-ils aujourd’hui privés de l’outil officiel de traçabilité. Et, au regard de ses contours actuels, ils ne pourront probablement pas demain bénéficier du label de l’Ademe.

Il serait plus simple de permettre aux producteurs d’émettre des GO sans les vendre

Initialement, cette « incompatibilité » entre GO et subventions publiques visait à interdire aux producteurs de tirer profit des GO. De fait, il serait certainement plus simple de permettre aux producteurs d’émettre des GO sans les vendre. Cela allègerait le code de l’énergie de multiples dispositions. Les services de l’Etat n’auraient plus à assumer la charge de la mise aux enchères… Et cela simplifierait grandement l’établissement d’un label par l’Ademe… S’ensuivrait un double effet de simplification et de rétablissement des GO dans leur essence : garantir la traçabilité aux consommateurs !

Une autre disposition est à relever : « Sur le territoire national, seules les garanties d’origine ont valeur de certification de l’origine géographique de l’électricité produite aux fins de démontrer aux clients finals la part ou la quantité d’énergie produite par une installation donnée ou dans une zone géographique donnée ».

La GO pourrait ainsi devenir l’équivalent d’un label « bio et local » dans le domaine agricole. Si toutefois ce label était réservé aux agriculteurs ne bénéficiant d’aucune aide publique!

2 Energie citoyenne et autoconsommation

L’article 5 du projet d’ordonnance traites des communautés énergétiques citoyennes et des communautés d’énergie renouvelable.

Les dispositions communes méritent d’être regardées de près. Il est en effet stipulé que « ces communautés ne peuvent détenir ou exploiter un réseau de distribution d’électricité, de gaz naturel ou de chaleur ». 

Les réseaux de chaleur exclus des communautés citoyennes ?

Si l’on comprend la volonté de préserver le monopole sur le réseau public de distribution d’électricité, il est important :

  •  de rappeler que ce monopole n’existe pas en droit pour les nouvelles concessions de gaz naturel,
  • Et de s’interroger : pourquoi des réseaux de chaleur – notamment ruraux – seraient exclus des communautés citoyennes alors qu’ils font partie des priorités affichées par les pouvoirs publics ?

Enfin, le texte propose de ne plus limiter l’autoconsommation collective aux utilisateurs du réseau basse tension, ce qui entraîne potentiellement un changement majeur de périmètre.

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Crédit photo : Solar pannel cc Sander van Dijk Flickr