Résolution d’un litige et responsabilité du fournisseur

22 Sep, 2025

GP conseil a contribué à résoudre un litige opposant un gros consommateur de gaz à son fournisseur. Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette mission.

Plantons le décor

Un contrat de gaz alimentant une usine grosse consommatrice (T4 pour les intimes) arrive à échéance au 31 décembre 2022. Le site appartient à une PME de l’agro-alimentaire d’envergure régionale. Il doit fermer en 2025 avec un transfert de la production vers une nouvelle usine. Mais, en attendant le déménagement, il a besoin de gaz.

Pour mémoire, l’été 2022 a été meurtrier pour les consommateurs de gaz…

La PME choisit de renouveler le contrat auprès de son fournisseur habituel, qui – soyons justes – est probablement lui-même bien embêté…

Les termes du contrat

En l’absence de témoin direct des échanges, il est difficile d’affirmer avec certitude que la perspective du déménagement a été portée à connaissance du fournisseur. Cependant, les propositions émises par celui-ci –cohérentes avec les prix de l’époque, donc élevées – font apparaître une forte dégressivité pour un contrat d’une durée assez longue.

Les deux protagonistes signent en août 2022 un contrat de 4 ans, du 1er janvier 2023 au 1er janvier 2027. Le prix du gaz est fixé à 99 €/MWh.

Précision importante, il s’agit d’un contrat sans obligation d’enlèvement par le client. Autrement dit, les prévisions de consommation ne sont pas des obligations de consommation.

Les difficultés commencent

Voici venir l’hiver 2024 : le calendrier du déménagement se précise. L’industriel se tourne vers son fournisseur pour demander les conditions de sortie. Patatras : ce dernier évalue les pénalités à plusieurs centaines de milliers d’euros correspondant à l’intégralité de la consommation prévisionnelle jusqu’à la fin du contrat. L’argument est classique : les volumes en question ont été achetés par le fournisseur au marché pour répondre aux besoins du client. Passons sur l’absence de marché à quatre ans…

Quelque peu sonné et dans l’incapacité de payer une telle somme, l’industriel entame une lecture des clauses du contrat – avec l’appui de GP conseil.

Lecture intéressante s’il en est. Les CGV sont relativement claires même si certaines ambiguïtés gênent la lecture – le contrat est-il régi par la CAR ou la quantité déclarée ? Mais CGV peu adaptées à la vie industrielle.

Capacité d’adaptation

Au moins un point du contrat ne comporte pas d’ambiguïté : en cas de changement de consommation, une révision des quantités est de droit et entraîne un avenant avec révision du prix. C’est bien le minimum pour un contrat sans obligation d’enlèvement.

L’industriel décide donc de revoir son organisation et de transformer son usine en site de stockage après le déménagement. Réduite au chauffage des locaux, la consommation de gaz va donc drastiquement diminuer.

Diligence du fournisseur ?

Été 2024: le client demande une révision à la baisse de la consommation prévisionnelle. La demande est dûment transmise au distributeur pour modifier la CAR de référence. Cette CAR est modifiée dès la facture d’août 2024. Puis, surprise, la voici révisée à la hausse en octobre.

Or, le fournisseur ne fait… aucune proposition d’avenant au contrat.

Pas davantage de proposition de révision du tarif d’acheminement. Pourtant, le site est passé de T4 à T2 soit une baisse de tarif d’environ 3000 € mensuels…

Le client insiste quelque peu pour mettre en cohérence le contrat et l’abonnement.

La réaction du fournisseur ? Il arrête la facturation à partir de décembre.

Durant l’hiver 2025, après quelques échanges peu fructueux, rendez-vous est pris avec le fournisseur.

Celui-ci réitère le montant des pénalités de sortie, explique que ce contrat lui coute très cher, refuse de proposer un avenant, menace de mettre unilatéralement fin au contrat pour défaut de consommation…

Dénouement

Avec l’appui de GP conseil et d’Hélène Fischer-Baronnier, avocate au barreau de Lyon, l’industriel met en demeure le fournisseur de proposer un avenant au contrat initial afin de tenir compte de l’évolution des consommations du site.

Entre temps, la chaudière est tombée en panne. L’industriel se demande quelle attitude adopter d’autant plus qu’il a de potentiels acquéreurs pour le site…

Après avoir bien circulé, le courrier de mise en demeure finit par atterrir sur le bureau d’un nouvel interlocuteur chez le fournisseur. Brusquement, un accord est trouvé pour solder le contrat avec des pénalités divisées par plus de 10. On ne parle plus de centaines mais de dizaines de milliers d’euros. Ouf !

Morale de l’histoire

Outre l’importance cruciale de bien lire les contrats, cette histoire souligne qu’un fournisseur peut mettre à profit l’asymétrie d’informations sur le fonctionnement du marché du gaz avec des clients dont ce n’est pas le métier.

Mais surtout, ce fournisseur a largement failli à ses devoirs d’information et d’accompagnement tout en refusant de prendre en compte la vie d’une entreprise industrielle et ses aléas.

Désormais plus aguerri, l’industriel va mettre systématiquement les fournisseurs en concurrence et porter une attention toute particulière aux clauses contractuelles.

L’apport de compétences externes a permis de rétablir la symétrie d’accès aux informations. L’industriel a donc éviter de payer des pénalités indues qui auraient fragilisé son activité.

Si votre entreprise ou collectivité est confrontée à une situation équivalente ou fait face à un litige complexe, n’hésitez pas à nous consulter.

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Crédit photo : Rubik’s cubes, Vincent Tcheng Chang, – Flickr