Le biogaz se volatilise

14 Sep, 2020

Absent du plan de relance, le biométhane ne semble guère avoir les faveurs du gouvernement qui soumet au CSE un tarif d’achat en forte baisse, ce mardi 15 septembre. Un coup d’arrêt à la filière ?

Mis à jour le 17 septembre. A l’issue des discussions au CSE, la ministre de la Transition écologique a annoncé devant la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale l’ouverture d’une concertation avec la filière du biogaz pour discuter de nouveaux mécanismes de soutien. “Nous réfléchissons à des mécanismes de soutien non-budgétaires”, a-t-elle indiqué la ministre, en mentionnant “l’obligation d’incorporer du biogaz dans le gaz”.

CSE du 15 septembre: la filière inquiète

Dans le plan de relance présenté par le gouvernement le 8 septembre, nulle trace de biométhane. Un gaz est souvent transparent, mais généralement on en discerne quelques traces. Or, là, ni dans le volet de la transition énergétique ni celui consacré à l’agriculture, il n’est mentionné. Il est ainsi proposé une prime à la conversion pour les véhicules électriques, mais pas pour le GNV – alors que le GNV est aujourd’hui la solution la plus couramment retenue pour la conversion des véhicules lourds pour diverses raisons (poids des batteries, autonomie…).

Cette absence inattendue pose question. Et même pose des questions.

Le biométhane est-il encore considéré comme une énergie renouvelable ? Et, si oui, pourquoi ne bénéficie-t-il pas des soutiens du plan de relance à la différence des autres EnR ?

Produire du biométhane a du sens d’un point de vue écologique (circuits courts, valorisation des déchets…) mais également économique : moindre dépendance énergétique et rééquilibrage de la balance commerciale, création d’emplois locaux, soutien à la filière agricole… Nombre de collectivités sont d’ailleurs impliquées dans les projets de méthaniseurs, de réseaux dédiés (ainsi de la dorsale des Mauges, avec le Syndicat d’énergies du Maine-et-Loire) et la création de stations d’avitaillement proposant du bioGNV.

Le tarif d’achat du biométhane examiné par le CSE

Quelques jours après, la filière regarde avec inquiétude l’ordre du jour du Conseil supérieur de l’énergie. Ce mardi 15 septembre, le CSE, organe consultatif, devrait faire le plein de participants pour examiner deux textes relatifs aux tarifs d’achat du biométhane : un projet d’arrêté fixant les conditions d’achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel et un projet de décret portant diverses dispositions d’adaptation de l’obligation d’achat à un tarif réglementé du biométhane injecté dans un réseau de gaz naturel.

Selon l’association France Gaz renouvelables, rassemblant agriculteurs, collectivités locales, industriels et acteurs de l’énergie, si ces dispositions étaient adoptées, elles se traduiraient par une «baisse immédiate pouvant aller jusque 15% par rapport au tarif actuel suivie de nouvelles baisses annuelles d’ores-et-déjà programmées à minima de 2%, et des conditions d’accessibilité restrictives.» L’association évoque un possible «arrêt de la filière méthanisation en France à l’horizon 2022-2023.» Par ailleurs, les textes limitent le dispositif d’obligation d’achat aux petits projets (300nM3) mais le dispositif d’appel d’offre pour les autres étant encore inconnu, que va-t-il se passer ?

La filière est-elle déjà mature?

Dans son rapport au CSE, le gouvernement explique que le «dispositif d’aide, mis en place en 2011, a permis d’amorcer le développement de la filière de production de biométhane qui, après un démarrage modeste, a connu un fort dynamisme au cours des derniers mois. Au 30 juin 2020, 149 installations injectent du biométhane dans les réseaux de gaz naturel, pour une capacité de production cumulée de 2,7 TWh/an, en hausse de plus de 80% en un an. La capacité de production cumulée des installations et projets pour lesquels des contrats d’obligation d’achat ont été signés atteint désormais 13 TWh/an, dont 10,5 TWh/an pour les contrats signés après le 1er avril 2019. Le dispositif d’obligation d’achat de biométhane à un tarif réglementé a ainsi permis de sécuriser, voire de dépasser, l’objectif fixé pour 2023, et il peut donc évoluer, conformément à ce qui avait été annoncé dans la programmation pluriannuelle de l’énergie.»

De fait, est-il poursuivi, les projets de décret et d’arrêté «visent à apporter plusieurs adaptations au dispositif d’obligation d’achat de biométhane à un tarif réglementé, de façon à tenir compte de cette maturité atteinte par la filière de production de biométhane.» Il est loisible à chacun de discuter la maturité d’une filière encore émergente mais, l’avis de la CRE sur ces modifications n’étant pas encore disponible et en l’absence d’éléments sur d’éventuelles baisses de coûts justifiant ces modifications tarifaires, la réduction significative des dispositifs de soutien suivant de près un plan de relance d’où le biométhane est absent a de quoi surprendre.


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